Programme Projets d'artistes / projets de musées

Responsables : Véronique Goudinoux, Raphaël Gomérieux, Natacha Yahi

(Musée du Quai Branly - Jacques Chirac ; Musée national de l’Histoire de l’Immigration ; Africa Museum de Tervuren ; International Slavery Museum de Liverpool ; London Museum Docklands, etc.) :

Aujourd’hui, des musées d’histoire ou des musées dits parfois de « civilisation » ou de « cultures du monde » invitent des artistes contemporains à réaliser, dans leurs murs, des œuvres, des expositions ou des interventions. Parallèlement, des musées d’art moderne et contemporain présentent des œuvres, objets ou images qui réinterrogent l’histoire.

Comment comprendre ces déplacements hors de ce qui semble être la fonction première de ces institutions — informer sur tel pan d’histoire pour les premiers ; exposer des ‘objets’ artistiques pour les seconds ? Quelles formes prennent ces projets et que déplacent-ils exactement ? Quels en ont été les enjeux, les étapes, les difficultés ? Quels débats ont-ils suscités ? De quelles difficultés sont-ils éventuellement porteurs ?

On s’attachera également à comprendre en quoi ces initiatives peuvent-elle contribuer à reconfigurer certains axes du projet muséal des institutions concernées, et comment, réciproquement, les démarches artistiques se trouvent transformées par ces collaborations spécifiques avec les musées. 

 

Une recherche collaborative

Ce programme a pour particularité d’être réalisé avec les différents acteur·es de ces musées engagé·es dans ces projets (conservateur·rices, curateur·rices, scientifiques, médiateur·rices, etc.). Il met ainsi en oeuvre un paradigme de recherche finalement assez peu courant, celui d’une recherche collaborative qui associe aussi bien des artistes, des acteur·trices de ces musées que des chercheur·ses, des doctorant·es ou des étudiant·es de master. Cette recherche collaborative prend plusieurs formes : 

- celle d’un comité scientifique « mixte » composé des différents acteur·trices ; 

- celle d’ateliers de recherche publics conçus selon des modalités particulières (voir ci-dessous)

- celle de la restitution elle aussi collaborative des résultats de la recherche (production d’entretiens, filmés ou non, de carnets de recherche spécifiques documentant les projets étudiés, etc.).

De même que les acteur·trices intervenant·es dans les musées appartiennent elles et eux-mêmes à des sphères et disciplines différentes, les chercheur·ses hors musées sont issu·es de champs variés (arts plastiques, histoire de l’art, muséologie, anthropologie, études culturelles, sociologie, etc.). 

 

Des ateliers de recherche

C’est par la constitution d’ateliers de recherche ouverts aux publics que ce programme a débuté (voir les quatre journées organisées en 2022, 2023, 2024 et 2025). Il a été proposé à certain·es acteur·trices des musées sollicités (conservateur·trices, chargé·es des résidences, etc.) d’inviter pour une séance de travail commune celles et ceux (artistes ou non) qui ont conçu avec eux un projet ou une exposition à partir de leurs collections ou fonds. Cette façon de déléguer les invitations suscite des décalages intéressants. Pour un·e chercheur·se en sciences humaines et sociales, opter pour ne pas avoir la totale maîtrise du choix de ses invité·es est assez peu courant. L’objectif de ce principe de travail est de favoriser l’émergence de descriptions, d’observations, de commentaires, d’analyses ou de récits différents, parfois divergents, portant sur un même projet, sur ses enjeux et sur les effets qu’il a pu produire. Il s’agit par là d’éviter toute reconstruction univoque du processus généralement multipolaire qui a mené à la réalisation du projet en question ; en bref, de lui conserver le plus possible sa complexité. 

 

Le musée / la recherche : des formes singulières de « sphère publique » ?

 Ces ateliers à plusieurs voix ainsi que l’ensemble du programme soulèvent des enjeux relatifs à des questions contemporaines de société (mouvements migratoires, demande de restitution d'objets muséaux, etc.) qui sont étudiées et débattues avec et par différents acteur·trices (artistes, conservateur·es, universitaires, étudiant·es) sous des perspectives différentes, l’objectif étant de favoriser la transformation de l'espace universitaire en l'une de ses possibles (mais pas toujours mise en place) occurrences, une sphère publique permettant de manière soutenue des échanges et des débats sur des problèmes sociétaux non résolus, dont ceux des fonctions des musées ou de l’université aujourd’hui.